Succédant à la folle décennie des années 70, qui avait vu la musique
bretonne pour la première fois à l’honneur, depuis plus d’un siècle
et un certain Théodore Hersart de La Villemarqué, les années
futuristes, de 1981 à 1993 affectèrent profondément la création bretonne.
La plupart des musiciens de musique bretonne
se reconvertirent. De temps à autres, quelques productions parvinrent à sortir
du lot, mais globalement, tant la production musicale que scénique souffrirent
d’une désaffection du public.
Il fallu attendre 1993, pour qu’un album au titre prémonitoire
n’annonce la nouvelle génération, pas si nouvelle finalement.
Again, compilation rassemblant un panel du
travail d’Alan
Stivell des années 70 à 80, suscita un nouvel
l’intérêt chez le public, qui très rapidement se réappropria
la création bretonne dans son ensemble.
Entre 1991 et 1995 une constellation d’expériences musicales
innovantes s’imposa. En l’espace de 4 ans renaissaient les
ténors de la culture bretonne. Gilles
Servat faisait un retour remarqué avec l’Albatros
Fou, Dan
ar Braz fondait l’Héritage
des Celtes, Yann
Fanch Kemener et Didier
Squiban inventaient un duo de légende, Manu
Lann-Huel revenait avec de superbes enregistrements.
De nouveaux talents apparaissaient, qui à leur tour révolutionnaient
la musique bretonne, lui apportant un nouveau
souffle, l’énergie nécessaire pour résister plus d’une décennie.
Le premier, Denez
Prigent connecta la musique bretonne
aux expériences technologiques modernes, tout en conservant
l’âme de ces deux musiques, Annie
Ebrel, Noluen
Le Buhé, Marthe
Vassallo féminisèrent cet univers musical plutôt
masculin, le fusionnant également à d’autres mondes musicaux.
La fin des années quatre-vingt-dix, tout comme le furent celles
des années soixante-dix, aboutirent à une explosion exponentielle
du nombre de groupes. La Bretagne devenait
la deuxième région en production de disque, après la région
parisienne. Et d’importants rassemblements ponctuaient
la saison musicale
bretonne tels l’Interceltique
de Lorient, Les
Nuits Celtiques du Stade de France,
Le Festival
de Cornouailles, et offraient une tribune plus
large aux formations
de musique bretonne.
De plus en plus, la musique bretonne s’ouvre
aux sonorités du monde entier,
se métissant et s’enrichissant de nouveaux horizons. Des voix
extraordinaires, telles que Yann
Fanch Kemener, Annie
Ebrel ou Denez
Prigent, mêlent leurs accents traditionnels à
tous les types de musiques, jazz
(Jacques
Pellen, Celtic
Tales, Niou
Bardophones, Roland
Becker), classique
(Arz
Nevez, O’Stravaganza, Didier
Squiban, Yann
Fanch Kemener, Duo
Molard Manzano), rock
(Celtas Cortos, Gwenc'hlan,
Armens,
Matmatah),
ou électro
(Denez
Prigent, Anjel
IK, Stock An Dans) et les fusions
musicales nées de l’ouverture au monde de cette musique
bretonne se font avec richesse vers l’Afrique
(Trompettes du Mozambique, Erik
Marchand), Les Antilles (Carré
Manchot & Akiyo Ka), la Kabylie
(Mugar,
Thalweg,
Lila Noz, Tayfa),
les Balkans (Erik
Marchand, Patrick
Molard, Bagad
Kemper), le Maghreb (Alan
Stivell), la Chine (Denez
Prigent sur Sarac’h, Dour
Gönpo)…
La musique bretonne a su préserver son identité
et ses racines tout en évoluant et se modernisant. Elle est
à ce jour un courant musical reconnu et apprécié des 4 coins du globe.
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Jeremie Pierre JOUAN